Gestion d’une épicerie : fixer les prix de vente et gérer la logistique
Comment fixer les prix de vente des produits ?
Lorsque le commerçant s’installe ou opère son commerce, ce dernier a à cœur de ne pas détruire trop de produit. À ce titre, la démarque, qu’il s’agisse de produits périmés, de vols ou de casse peut atteindre jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires si l’on n’y prête pas attention.
Le commerçant a également à cœur de générer du profit et donc, de placer des prix de vente supportables par la clientèle.
Concernant ce dernier point, il est d’usage de parler, lors de la fixation des prix de vente, de coefficients multiplicateur sur le prix d’achat. Généralement, l’on parle d’un coefficient sur le prix d’achat hors taxes du produit, afin de déterminer le prix de vente TTC du produit auprès du consommateur final. Si la grande distribution opère parfois des coefficients de l’ordre de 1,4 à 1,6, il n’est pas rare que les commerçants pratiquent des coefficients de 2 à 2,2. Ces coefficients sont acceptables par le consommateur si ce dernier trouve :
- Des produits qu’il ne trouvera pas dans la distribution généraliste
- Du conseil qu’il ne trouvera pas dans la distribution généraliste
Il est possible, par un travail sur les assortiments, de trouver des produits offrant des prix d’achats satisfaisants et se démarquant de la concurrence. Les produits issus de gros industriels de l’agroalimentaire ne sont pas systématiquement moins chers que des produits de petits producteurs car leurs frais de fonctionnement (siège), les budgets de communication, génèrent parfois des charges que ces derniers doivent répercuter dans le prix de vente de leurs produits.
La détermination des prix de vente permet ensuite de calculer la marge brute. Par marge brute, l’on entend le prix de vente revenant dans la poche du détaillant soit le prix de vente des produits hors taxes (après avoir reversé la TVA à l’Etat) moins le prix d’achat hors taxes auquel le détaillant a acheté le produit. Il faut donc retraiter la TVA que le détaillant récupère auprès du client final pour la reverser à l’Etat. Pour les achats, ce dernier récupère la TVA auprès de l’Etat.
La TVA dans l’alimentaire supporte aujourd’hui trois taux :
- Un taux dit réduit de 5,5 % pour la plus grande partie des produits
- Un taux dit normal de 20 % pour les vins et alcools, le chocolat au lait et quelques produits de luxe ou de confiserie
- Un taux dit intermédiaire de 10 % pour la partie restauration
Il est assez difficile d’avoir une vision précise des marges brutes, selon ce que l’on inclue dedans. En effet, la logique veut que l’on parle de ventes moins achats. Lorsque l’on parle des achats, il convient d’y inclure les accessoires aux achats dont la logistique et le transport, la variation des stocks (en plus ou en moins, selon les années), la casse…
Les chiffres de la grande distribution sont parfois trompeurs car la marge n’inclut pas les marges que peut faire en amont une centrale d’achat. Auquel cas, pour être exhaustif, il faudrait rajouter une partie de la marge amont effectuée par les centrales d’achats aux coefficients pratiqués par les hypers.
Gestion de la logistique pour bien gérer une épicerie !
La logistique est un point clé et trop souvent négligée dans l’approche du commerçant. Elle représente de 7 à 10 % du chiffre d’affaires des grandes enseignes de la distribution alimentaire et se décompose environ à 50/50 de transport et de logistique (entreposage et manutention).
Ce sont des frais difficiles à isoler car ils sont de natures diverses et pas toujours évidentes. En effet, il est fréquent que les fournisseurs pratiquent des franco de port. Par franco de port, on entend minimum de commande à partir du quel aucun frais de transports n’apparait même si ces derniers sont quelque part inclus dans le prix d’achat du produit et mutualisés sur l’ensemble des clients. Lorsque les franco de port ne sont pas atteints, il est possible soit :
- Que le transport soit facturé en sus
- Qu’il ne soit pas possible de commander
Le commerçant doit alors être vigilant si les franco de port lui paraissent trop élevés car il aura vite fait de charger son point de vente avec des produits qui ne tournent pas et donc finiront en perte, non sans avoir au préalable, « plombé » sa trésorerie.
Les franco s’entendent parfois en kg, parfois en colis mais le plus souvent en euros. Assez fréquemment, ces derniers sont entre 300 et 600 euros.
Certains fournisseurs ont des franco nettement plus réduits (de l’ordre de 150 euros), notamment les fournisseurs qui servent la restauration, gourmande de petits volumes livrés très fréquemment (parfois jusqu’à deux fois par jours pour certains fournisseurs de fruits & légumes servant la restauration à Paris notamment).
On retrouve alors parfois des livraisons de A pour B (d’un jour A au lendemain B), alors que plus généralement les fournisseurs du commerce de détail livrent de A pour C ou D ou encore une à deux fois par semaine. Les fournisseurs ayant des franco très réduits pratiquent en revanche généralement des prix de vente plus élevés, impactant le coût du transport dans ces derniers.
Lorsque le commerçant fera croître son commerce et si les volumes augmentent, ce dernier pourra souhaiter organiser sa logistique ou se pencher dessus. A ce titre, il faut prendre en compte quelques principes de base sur le transport et la logistique.
Le transport, élément clé de la gestion d’une épicerie
Le coût du transport, selon qu’il s’agisse de produits frais ou secs, est différent. Il se décompose généralement en trois étapes :
- La ramasse : de chez le producteur/fabricant jusqu’à une plateforme de regroupement
- La traction : de la plateforme de regroupement jusqu’à une plateforme d’éclatement
- La livraison : de la plateforme d’éclatement jusqu’au commerçant
A chaque étape, l’on parle d’une rupture de charge (c’est-à-dire du déchargement d’un véhicule à un autre, parfois de taille plus réduite soit d’un 36 tonnes pour une traction à un porteur pour la livraison par exemple).
Au travers de cette étape de rupture de charge, certaines opérations de logistique peuvent s’effectuer, qu’il s’agisse d’entreposage ou de manutention.
La logistique, l’autre élément clé de la gestion d’une épicerie
Au sein de leurs plateformes, les logisticiens (Stef, ID logistics, Malherbe, … selon leurs spécificités) peuvent être amenés à réaliser des opérations d’entreposage sur des durées plus ou moins longues et ou de mouvementer des colis ou des palettes.
Il est à noter que le coût de mouvement d’une palette chez un logisticien s’échelonne généralement entre 2,3 et 2,8 euros tandis que le coût de mouvement d’un colis/carton s’échelonne entre 0,23 et 0,8 euros.
L’alimentaire, vu le poids, l’encombrement des produits transportés et leur faible valorisation est gourmand en logistique et s’accommode mal des prestations de manutention au colis, contrairement aux produits très fortement valorisés (produits de luxe et de technologie).
En effet le coût de manutention d’un carton de 6 bocaux de soupe valorisés en prix de vente 18 ou 24 euros (prix de vente moyen estimé du bocal de 3 ou 4 euros) représente une quote part très élevée.
Si l’on prend l’exemple d’un mouvement de colis à 0,8 euros, cela représente entre 0,3 et 0,4 % du chiffre d’affaires pour un seul mouvement de colis au sein d’un entrepôt. Si l’on mouvemente un même colis composé de 6 smartphones, je vous laisse imaginer la différence !
En bref, avant de se lancer dans l’organisation d’une logistique intégrée, il conviendra de bien comprendre comment se décomposent les coûts, y compris les coûts cachés.
Trois natures de coûts :
- Coûts apparents de transport et/ou manutention : apparaissant si l’on organise soit même le transport ou si le fournisseur le facture en sus
- Coût cachés de transport et/ou manutention : inclus dans le franco de port du fournisseur (difficiles à estimer même si inclus dans le prix d’achat du produit)
- Coûts de manutention et d’entreposage sur le point de vente : très difficile à estimer, même si une logistique mal organisée et des flux de livraison incessants peuvent être générateurs de stress, de désorganisation, de perte d’efficacité sur le point de vente et donc de coûts additionnels très difficiles à identifier.
Extrait de la revue du détaillant Mai/juin 2018